1. Voir http://www.phdn.org/negation/faurisson/flaccus.html 2. Louis H. Feldman a constaté à propos de la charge anti-juive de Cicéron : « Cicéron [...], ainsi que nous l’avons remarqué, décrit les Juifs dans des termes qui rappellent ceux des fanatiques anti-juifs modernes » (Louis H. Feldman, Jew and Gentile in the Ancien World, Princeton University Press, 1993, p. 172). 3. R.Etienne <robert.etienne@free.fr>, « Re: Conférence révisionniste à Beyrouth », fr.soc.histoire, 16 janvier 2001, Message-ID: <9h786tculpru6ljeup2vft0savt31upgob@4ax.com>. Nous avons répondu sur le même forum de discussion le jour même: Gilles Karmasyn <gilkarm@worldnet.fr>, « Re: Conférence révisionniste à Beyrouth », fr.soc.histoire, 16 janvier 2001, Message-ID: <gilkarm-4B54F4.21243616012001@news.free.fr>. La présente page web est un adaptation et une correction de cet article. 4. Notons cependant que si Faurisson nous avait fait parvenir cette réponse, il nous aurait été impossible d’en faire part en public dans la mesure où cela aurait relevé de la divulgation d’un courrier privé. Il est de fait que la réponse envoyée par Robert Etienne n’apparaissait, à la date de son envoi, sur aucune page web. Remercions donc une fois encore Robert Etienne d’avoir rendu publique la « réponse » de Faurisson. 5. André Boulanger, « Notice », dans Cicéron, Discours, Tome XII, Pour L. Flaccus texte établi et traduit par André Boulanger, cinquième tirage revu, corrigé et augmenté par Philippe Moreau, Les Belles Lettres, 1989, p. 59-59, 67. 6. André Boulanger, op. cit., p. 67. 7. Par exemple, H. Graetz écrit que « Nous ne savons quelle fut l’impression produite par ce discours, ni comment ce procès se termina pour Flaccus » (H. Graetz, Histoire des Juifs, tome deuxième, de l’exode babylonien (538) à la destruction du second Temple, A. Lévy Libraire-éditeur, 1884, p. 207) 8. Erich S. Gruen, The Last Generation of the Roman Republic, University of California Press, 1995 — 1ère éd. 1974 —, p. 291 9. Harry J. Leon, The Jews of Ancient Rome, Hendrickson Publishers, 1995, p. 4 10. Louis E. Lord, « Introduction », dans Cicero, The Speeches, Harvard University Press, p. 358 11. Havard University Press, 1968, p. 92 12. André Boulanger, op. cit., p. 67. 13. E. Mary Smallwood, The Jews under roman rule, Leiden - E. J. Brill, 1981, p. 124-125. 14. E. Mary Smallwood, The Jews under roman rule, op. cit., p. 126 15. Harry J. Leon, The Jews of Ancient Rome, op. cit., p. 5 16. Erich S. Gruen, The Last Generation of the Roman Republic, op. cit., p. 290 17. L. Richardson Jr, A new topographical dictionnary of Ancient Rome, The Johns Hopkins University Press, 1992, p. 181-182. 18. La connotation péjorative de « tourbe » a été récemment relevée par Pierre André-Taguieff, dans les discours racistes du XIXe siècle. Évoquant les multiples usages péjoratifs de variations du mot « sémite » chez Gobineau, Pierre André-Taguieff cite par exemple l’expression suivante chez Gobineau : « la tourbe plus qu’à demi-sémitique » (Pierre André-Taguieff, La couleur et le sang, Mile et une nuits, 2002, p. 47, note 82). Taguieff écrit: « Chez Gobineau, la démocratie est notamment approchée et stigmatisée à travers la métaphore du “marécage”, ce dans quoi les races nobles s’embourbent, l’élément par lequel, plus fatalement qu’àprès les conquêtes guerrières, les races supérieures s’enlisent dans “la boue” des races impures. L’éradication de l’élément ethniquement supérieur s’opère par son embourbement dans l’élémént inférieur : immersion dans la tourbe humaine, submersion par la marée de boue infra-humaine. » (Ibid, p. 50). On le voit, les réflexes lexicaux de Faurisson viennent de loin...

Faurisson, un antisémite

A-t-on lu Cicéron?

Quand Faurisson falsifie Cicéron et invente un complot juif vieux de deux mille ans


Un jour, Faurisson s’est comparé à Lucius Flaccus, homme politique romain corrompu qui avait volé la République romaine et plusieurs catégories d’habitants de l’Empire, dont des Juifs1. Lucius Flaccus fut jugé pour ces concussions et défendu par son ami Cicéron, dans un plaidoyer célèbre, le Pro Flacco. Comme des Juifs faisaient partie des plaignants, Faurisson a considéré que Flaccus était un « illustre prédécesseur » et souscrit aux propos anti-juifs de Cicéron dans son plaidoyer2. Cependant Faurisson passait sous silence le contenu de l’accusation et surtout le fait que la partie juive de celle-ci était marginale, le tout afin de faire passer Flaccus pour une pauvre victime des méchants Juifs. Cette présentation frauduleuse à caractère antisémite a été démontée sur le présent site web.

Mais Faurisson n’aime pas la critique. Il a donc rédigé une longue réponse qu’il a transmise à l’un de ses fervents partisans sur les forums de discussion francophones, Robert Etienne. Entre autres exploits, Robert Etienne a recopié, en 1999, la propagande antisémite de Goebbels. Le 16 janvier 2001, il envoyait sur le forum fr.soc.histoire la « réponse » de Faurisson en prétendant que nous la cachions3. On verra que nous n’avions aucun intérêt à « cacher » ce morceau d’anthologie antisémite4. En effet, Faurisson y falsifie Cicéron et réécrit l’histoire romaine en prétendant que le procès contre Flaccus était une « machination juive ». En cela, il ne fait que reprendre ce qu’écrivait déjà un fanatique antisémite allemand en 1923, un très proche ami d’Hitler et l’un des premiers idéologues du parti nazi, Dietrich Eckart. Et Faurisson de protester qu’il n’est pas antisémite!

Dans la présente page, nous donnons donc la réponse de Faurisson relative au procès Flaccus et à la plaidoirie de Cicéron avec notre analyse. Une autre partie de la réponse de Faurisson, relative à la loi Gayssot, fait l’objet d’une analyse séparée.

Afin d’appréhender le contexte du présent texte, on pourra faire précéder la lecture de ce qui suit par la page à laquelle Faurisson prétend répondre, http://www.phdn.org/negation/faurisson/flaccus.html.

Le texte de la lettre de Faurisson est cité intégralement (hors la partie relative à la loi Gayssot), il apparaît encadré dans la suite.

 Faurisson écrit :

Réponse de Robert FAURISSON à Gilles KARMASYN

Ma réaction à votre texte du 26 juin 2000, « Faurisson se compare au politicien pourri Lucius Flaccus »
<http://www.phdn.org/negation/faurisson/flaccus.html>

Votre texte contient nombre d’erreurs.

Voilà un programme alléchant. On se rendra compte que le film est loin d’être à la hauteur de cette bande annonce. En fait, c’est la réponse de Faurisson qui contient nombre d’« erreurs ».

 Faurisson écrit :

Laissons de côté les erreurs vénielles que vous avez commises soit dans la reproduction de mon propre texte, soit dans vos indications de références,

Certes. Cela a été corrigé depuis longtemps...

 Faurisson écrit :

soit dans la rédaction de votre commentaire, soit encore sur le titre exact de L. Flaccus, lequel était propréteur d’Asie mineure.

Nous avions écrit en effet que Flaccus avait été « préteur ». Nous ne faisons que suivre en cela Boulanger, traducteur et commentateur de Cicéron, sans doute beaucoup plus compétent que Faurisson. Boulanger discute de la fonction de Flaccus et s’en tient à parler de « préture » à plusieurs reprises5. Il semble que Faurisson, qui dispose pourtant du texte de Boulanger (voir plus bas), ne l’a pas lu.

 Faurisson écrit :

Ne prenons en considération que les erreurs de fond.

Les erreurs de fond

La plus grave a consisté à présenter de simples accusations comme des crimes ou des délits effectivement commis. D’après André Boulanger, que vous citez par ailleurs, L. Flaccus « fut certainement acquitté » (Cicéron, Discours, tome XII, Les Belles Lettres, 1966, p. 67). Or, cela, vous ne le dites pas.

Comme à son habitude, Faurisson cite de façon totalement partielle. Boulanger confirme ce que de nombreux autres historiens ont pensé: il ne s’agissait pas de « simples » accusations; Flaccus était coupable. Boulanger rappelle qu’un auteur latin a lui-même souligné cet état de fait. Or que lit-on à la page même citée par Faurisson (que Faurisson aurait du citer plus complètement...)?

« Que Cicéron ait défendu une mauvaise cause, cela n’est guère douteux. Même si l’on n’avait pas à ce sujet le témoignage de Macrobe [1. Sat. 2, 1, 13: “Cicero in causis, cum nocentissimos reos tueretur, uicrotiam iocis adeptus est : ut ecce pro Flacco, quem repetundarum reum ioci opportunitate de manifestis criminibus exemit.”], on pourrait aisément l’inférer du ton que l’orateur a adopté, conformément à la règle qu’il devait énoncer plus tard [2. De Orat., 2, 25, 105 : “Ac nostrae fere causae, quae quidem sunt criminum, plerumque infitiatione defenduntur. Nam et de repetundis, quae maximae sunt, negande fere sunt omnia.”]. Il oppose aux accusateurs des démentis arrogants beaucoup plus que des réfutations. Lorsqu’il consent à discuter, ses explications sont si confuses qu’elles éveillent aussitôt la méfiance. Il est bien difficile de croire, après avoir lu le plaidoyer, qu’une bonne partie de la contribution levée pour la flotte et de l’or destiné au temple de Jérusalem ne soit pas restée entre les mains de Flaccus, que le préteur ait pu légitimement disposer de l’argent déposé à Tralles, que les plaintes des habitants de Temnos et de Sextilius Andron n’aient pas été pleinement justifiées. Bien plus, dans la péroraison, on a l’impression que le défenseur plaide coupable, puisque ses arguments ne s’inspirent que de l’opportunité politique.

Ce sont sans doute les arguments de cette sorte qui déterminèrent la décision du tribunal, favorablement disposé pour le parti des optimates. Flaccus fut certainement acquitté mais ne parvint jamais à la magistrature suprême que Cicéron n’avait cessé de lui promettre en récompense de ses services6. »

L’acquittement de Flaccus pour motifs politiques, ainsi que l’écrit Boulanger, importe peu au regard de sa culpabilité effective. Les coupables acquittés courent les rues. Leur acquittement ne diminue en rien le fait qu’ils ont commis leurs forfaits. On remarquera, avec Faurisson que Boulanger écrit que Flaccus « fut certainement acquitté ». Et de fait les historiens n’ont pas de preuve qu’il le fut7. La notion de l’acquittement relève d’une analyse historique, la même qui aboutit à la conclusion de sa culpabilité.

Il est d’ailleurs caractéristique que Faurisson, pour sa « défense », en appelle au fait que Boulanger évoque l’acquittement de Flaccus, sans mentionner le moins du monde qu’à la page même invoquée, Boulanger déclare Flaccus coupable. Toute la technique faurissonienne est là, dans la citation partielle et hors contexte. Il faut, avec Faurisson, toujours se référer aux sources qu’il cite. On se rend alors compte qu’il les déforme quasi-systématiquement pour leur faire dire ce qu’elles ne disent pas.

Sur la culpabilité de Flaccus, on pourrait citer de nombreux historiens. Pour Erich S. Gruen, la culpabilité de Flaccus est évidente8. Harry J. Leon pour sa part écrit que Flaccus « a échappé à un châtiment mérité9 ». Louis E. Lord, traducteur et commentateur de Cicéron en anglais, écrit que Cicéron fit peu d’efforts pour réfuter les accusations portées contre Flaccus, que cela était d’ailleurs probablement impossible10.

Sur les motifs tout politiques de l’acquittement de Flaccus, outre les ouvrages déjà cités, mentionnons Matthias Gelzer, Caesar, Politician and Statesman11.

 Faurisson écrit :

Les accusations d’escroqueries, de détournements de fonds et d’extorsions d’argent dont vous accablez L. Flaccus sont celles que portaient contre lui ses accusateurs et, en particulier, les juifs.

Ces accusations étaient fondées. Y compris celles portées par les Juifs. On voit mal en quoi les Juifs auraient été consubstantiellement à l’abri de la rapacité de Flaccus. Boulanger le confirme.

On remarquera que dans son évocation initiale de l’accusation juive, Faurisson avait pris la précaution de parler des accusateurs juifs de Flaccus, « notamment ». Ici le « notamment » est devenu « en particulier ». Il est de fait que la thèse de Faurisson sur le procès de Flaccus se radicalise dans sa réponse par rapport à son texte initial! Rappelons que dans la plaidoirie de Cicéron, le passage relatif aux Juifs représente moins de 3% du total. On verra plus bas pourquoi dans l’esprit d’un Faurisson, l’accusation juive devient si « particulière ».

 Faurisson écrit :

Vous n’aviez pas le droit d’en faire mention comme s’il s’agissait de faits avérés.

Si! Car tous les historiens, et Boulanger avec eux, s’accordent sur la culpabilité de Flaccus. C’est Faurisson qui n’avait pas le droit de passer sous silence le contenu du procès contre Flaccus et le fait que l’accusation portée par les Juifs n’était qu’un élément parmi d’autres plus graves.

C’est Faurisson qui n’avait pas le droit de donner l’impression que les Juifs jouaient un rôle prépondérant dans cette accusation. Faurisson qui n’avait pas le droit de passer complètement sous silence le contexte, le contenu, et la nature de l’accusation contre Flaccus...

Si Faurisson avait vraiment été convaincu de l’innocence de Flaccus, pourquoi n’avait-il pas, lui, évoqué dès le début l’acquittement de Flaccus? Parce que bien évidemment il aurait fallu s’étendre sur l’accusation et rappeler que l’acquittement est un fait déduit du contexte par les historiens, contexte dont les mêmes historiens déduisent la culpabilité de Flaccus, nonobstant son acquittement.

Nous pêcherions par manque de précision? Mais Faurisson mentait par omission. Et Flaccus était coupable.

 Faurisson écrit :

Si vous n’approuviez pas la décision des juges, il fallait nous donner vos raisons.

Que Faurisson, qui s’était bien gardé de révéler quoique ce soit sur le contenu de l’accusation nous fasse ce procès relève du comique. C’est lui qui aurait du, dès le départ, exposer le contexte et non le taire. De plus, si Faurisson acquiesse à tout ce que dit Cicéron, il n’avait qu’à donner, lui, ses raisons, ce qu’il aurait dû faire dès son évocation de Flaccus. Peut-être ne pouvait-il s’y résoudre puisque, malgré son acquittement politique, Flaccus était coupable ?

De plus, il ne s’agit pas d’approuver ou désapprouver la décision, toute politique, des juges, mais de tenir compte de la réalité, telle que rapportée par les historiens et les traducteurs de Cicéron: Flaccus était coupable. Il ne s’agit pas de notre thèse, mais de leurs constatations, des constatations de personnes autrement compétentes que Faurisson ou nous. Nos raisons, ce sont le travail et l’interprétation de tous les historiens et traducteurs de Cicéron.

 Faurisson écrit :

En outre, vous affirmez que L. Flaccus avait « détourné à *son profit* le tribut payé par les Juifs de Rome et envoyé chaque année au temple de Jérusalem ».

Nous n’affirmons rien. Nous reprenons ce qu’ont écrit historiens et littérateurs avant nous. Boulanger écrit:

« Il est bien difficile de croire [...] qu’une bonne partie [...] de l’or destiné au temple de Jérusalem ne soit pas restée entre les mains de Flaccus12 ».

A la page même invoquée par Faurisson...

 Faurisson écrit :

Mais, résidant en Asie mineure, L. Flaccus n’avait aucun pouvoir sur les juifs de Rome, lesquels, au demeurant, ne versaient aucun « tribut » au temple de Jérusalem.

Premier point: « Juifs de Rome » désignait bien évidemment les Juifs de l’empire romain, en l’occurrence ceux soumis à l’autorité de Flaccus, c’est-à-dire ceux de la province d’Asie mineure, qu’il administrait. Cette précision a été rétablie dans la page concernée.

Second point: Faurisson n’en est pas à une contre-vérité historique près; il saura, n’en doutons pas, nous citer les sources qui démontrent que les Juifs de Rome (la ville de Rome) ne payaient aucun tribut au Temple de Jérusalem. Tous les Juifs de la diaspora étaient soumis à l’impôt du Temple. C’est là un point accessoire, mais on voit que Faurisson, ne recule devant aucune contre-vérité pour contredire ce qu’avance son critique...

 Faurisson écrit :

La réalité, pour autant qu’on puisse la reconstituer en la circonstance, semble avoir été la suivante :

Ici Faurisson ne fait que reprendre la défense de Cicéron.

 Faurisson écrit :

bravant une loi interdisant les exportations d’or, les juifs de Rome et du reste de l’Empire avaient pris l’habitude de transférer de l’or vers Jérusalem.

Pas « de l’or »: leur or.

D’autre part, Faurisson devrait se relire avant d’écrire n’importe quoi. En effet, au paragraphe précédent Faurisson écrit « les juifs de Rome [...] ne versaient aucun “tribut” au temple de Jérusalem » et maintenant, 5 lignes plus bas, il nous assène « les juifs de Rome [...] avaient pris l’habitude de transférer de l’or vers Jérusalem ».

D’abord on avance une contre-vérité et ensuite on dit le contraire! Quant à écrire « transférer de l’or vers Jérusalem », il s’agit tout de même de ne pas oublier que l’on parle de biens leur appartenant et qu’ils envoyaient en tribut religieux au Temple de Jérusalem. Point. Il ne faudrait pas, comme Rassinier, suggérer qu’ils volaient cet or aux Romains... n’est-ce pas?

Sur le tribut que les Juifs de l’Empire, et très probablement ceux de Rome, payaient au Temple de Jérusalem, voir E. Mary Smallwood, The Jews under roman rule13.

 Faurisson écrit :

L. Flaccus, pour sa part, voulut remettre en vigueur, dans sa province, la loi bafouée par ces pratiques. En l’an 62, il s’avisa de saisir l’or que les juifs de sa province voulaient envoyer à Jérusalem et, selon Cicéron, il le versa au Trésor romain.

Cela, c’est ce que dit Cicéron pour défendre son client. Il est tout à fait comique de voir Faurisson, l’homme qui n’aime pas les témoins (pour lui, les témoignages sur la Shoah sont soit des mensonges, soit extorqués), faire entière confiance au seul Cicéron, alors que celui-ci défend son ami, son client et qu’il a l’habitude de pratiquer la plus excessive mauvaise foi dans l’exercice de son métier d’avocat. Faurisson ne donne évidemment pas la moindre raison qui permette d’accorder foi à Cicéron. Mais pour lui, il faut que Flaccus soit innocent. Même si tous les historiens, et Boulanger avec eux, s’accordent pour dire qu’il était coupable, et pas seulement de spoliations de biens juifs. Flaccus doit être innocent pour que les Juifs soient coupables.

Faurisson ferait aussi bien de réviser [sic] son histoire romaine. Il constaterait que Jérusalem, sans être rattachée à l’Empire, était déjà conquise par les Romains et que ce qui était interdit (mais parfaitement toléré dans les faits) c’était l’exportation d’or hors de l’empire. La défense de Cicéron reprend sans doute les arguties de Flaccus pour justifier sa confiscation du tribut religieux des Juifs d’Asie mineure. Boulanger et d’autres historiens ne doutent pas que quelqu’en fut le prétexte, au moins une partie de l’or pris aux Juifs par Flaccus avait atteri dans sa poche. Si les Juifs avaient été en infraction avec les lois de l’Empire, ne se seraient-ils pas abstenus de témoigner contre Flaccus ce qui revenait à avouer ainsi leur propre forfait?

En fait, le professeur E. Mary Sallwood considère justement que les Juifs d’Asie mineure, volés par Flaccus, « étaient libres d’envoyer leur impot du Temple à Jérusalem » et que la confiscation de Flaccus « était illégale »14.

L’historien Harry J. Leon le confirme: « Les Juifs dans toute la Diaspora contribuaient [à l’impot du Temple de Jérusalem], pour autant que nous le sachions, et aucune difficulté n’avait jusque là [l’affaire Flaccus] été faite contre leur envoi d’argent à Jérusalem »15.

Remarquons que Faurisson ne discute que l’accusation juive et passe sous silence tous les autres vols de Flaccus. Rappelons une fois de plus que la partie juive de l’accusation occupe moins de 3% dans la plaidoirie de Cicéron et que les historiens ne doutent pas de la culpabilité de Flaccus. Et c’est justement dans le cas des Juifs qu’il serait innocent? Quand cela serait le cas, la dissimulation par Faurisson de toute l’accusation (considérée comme fondée par les historiens) demeurerait, de même que ses mensonges antisémites sur la place qu’y occupent les Juifs et les nouveaux mensonges, également antisémites, qu’il profère plus bas en falsifiant Cicéron.

 Faurisson écrit :

D’où la colère des juifs d’Asie mineure, de Rome et d’ailleurs qui, sans porter plainte personnellement, suscitèrent un procès contre L. Flaccus.

Quoi?

« suscitèrent un procès contre Flaccus »?

Les Juifs?

Mieux: les « juifs d’Asie mineure, de Rome et d’ailleurs »!

Faurisson est en train de prétendre que le procès aurait été déclenché à l’initiative des Juifs (de tous les Juifs!). C’est bien évidemment un mensonge. Un mensonge antisémite, qui relève d’une théorie du complot digne des Protocoles des Sages de Sion. Un mensonge que Faurisson ne peut étayer par aucune citation, aucune référence, aucune source. Et pour cause. On appréciera le coup des Juifs « d’Asie mineure, de Rome et d’ailleurs », autant dire du monde entier: ils sont partout!

L’étude des historiens, celle du discours de Cicéron, de l’histoire romaine, montrent bien que le procès a été déclenché à l’initiative des ennemis politiques de Flaccus (Pompée, Crassus, César) qui n’ont eu aucun mal à trouver des traces de ses malversations. Puisque Flaccus avait commis des malversations.

 Faurisson écrit :

Celui-ci se retrouva accusé de toutes sortes de malversations, en particulier au détriment des juifs dont il aurait confisqué l’or à son profit (p. 67, 120).

Primo: les historiens s’accordent à juger que Flaccus était coupable des malversations dont il était accusé.

Secundo: on appréciera qu’une fois de plus Faurisson parle des Juifs « en particulier », alors que cette accusation là n’occupe qu’une place marginale.

 Faurisson écrit :

Vous me reprochez d’avoir passé sous silence le fait que l’accusation d’avoir volé les juifs « était justifiée ».

Nous reprochons à Faurisson d’avoir passé sous silence toute l’accusation. Nous reprochons surtout à Faurisson d’avoir passé sous silence que la partie juive de l’accusation était marginale et de prétendre mensongèrement à présent le contraire. Nous reprochons à Faurisson d’avoir tu le fait que les historiens tiennent Flaccus pour coupable. Nous pourrions même reprocher à Faurisson le fait de ne pas même avoir évoqué l’acquittement de Flaccus! Mais il est vrai qu’il ne pouvait le faire sans admettre qu’il s’agit là d’une conjecture historique et que ceux qui font la conjecture de l’acquittement font aussi celle de la culpabilité. Et l’on ne peut accepter l’une sans accepter l’autre.

 Faurisson écrit :

Mais, précisément, ladite accusation n’a pas été « justifiée » par les juges et, par conséquent, je n’avais pas pour obligation de dire le contraire de la simple vérité.

Encore une fois, voir le contempteur du procès de Nuremberg en appeler à une décision (probable, mais supposée) des juges pour justifier l’innocence de Flaccus a quelque chose de réjouissant. Flaccus était coupable, tout aussi sûrement qu’il fut acquitté, et nonosbstant cet acquittement dû au talent de son avocat. Il n’est ni le premier ni le dernier coupable acquitté.

L’obligation de Faurisson était bel et bien de mentionner le contexte du procès, son contenu. Mais une présentation honnête de ce contexte aurait contredit la thèse mensongère de Faurisson sur la place qu’occupe la partie juive dans les accusations contre Flaccus. La « simple vérité » était peut-être celle de l’acquitement de Flaccus, mais aussi celle de sa culpabilité et surtout celle de la place extrêmement marginale de la partie juive dans l’accusation.

 Faurisson écrit :

Une autre erreur : sur Cicéron et les juifs

Vous vous trompez en affirmant que Cicéron n’a porté qu’une attention « marginale » aux juifs et en écrivant que, parmi les accusations qu’il a proférées, celle qui visait les juifs était « presque la plus insignifiante ».

Moins de 3% du Pro Flacco: cela tient une place, non pas marginale, mais très marginale dans la plaidoirie de Cicéron. Faurisson raconte n’importe quoi.

 Faurisson écrit :

Cicéron donne clairement à entendre que toute l’affaire a été machinée par les juifs, dont le nombre et le pouvoir à Rome étaient, à son jugement, si considérables.

Encore? Faurisson réitère son délire antisémite...

« toute l’affaire a été machinée par les juifs »?

On rêve!

Ceci est une interprétation tout à fait frauduleuse de ce que Cicéron écrit et de la réalité du procès, telle qu’exposée notamment par Boulanger. Faurisson est incapable de citer le passage où Cicéron « laisserait entendre que toute l’affaire a été machinée par les juifs ». Car un tel passage n’existe pas. Mais le fait que Faurisson affirme que tel est le cas, démontre une fois de plus qu’il est, tant sur le fond que sur la forme, un antisémite. Le procès contre Flaccus, une machination juive? Et puis quoi encore! Nous avons bien un antisémite qui nous sort de son chapeau mité un complot juif d’il y a deux mille ans. Pathétique.

Pathétique... mais guère surprenant et surtout guère inovant. Car Faurisson n’est pas le premier à faire du procès contre Flaccus une machination juive. Pour cette fois, Faurisson a vraiment eu un « illustre prédécesseur »: le publiciste antisémite fanatique Dietrich Eckart. Dietrich Eckart, ami et modèle d’Hitler, Dietrich Eckart qui faisait porter la responsabilité du procès contre Flaccus sur les Juifs, dans un ouvrage posthume, paru en 1924, où Eckart relatait des entretiens qu’il avait eu avec Hitler: Le bolchevisme de Moïse à Lénine: entretien entre Hitler et moi. Que Faurisson reprenne un délire antisémite initialement proféré par un antisémite fanatique dans un ouvrage d’entretiens avec Hitler ne saurait être un hasard.

 Faurisson écrit :

Il va jusqu’à dire avec ironie qu’il n’est pas étonnant (« nimirum ») que D. Lélius Balbus,

Une remarque: Dans notre réponse initiale, nous avons sans doute été trop sévère avec Faurisson (c’est possible, bien qu’étonnant) en écrivant qu’il avait confondu l’accusateur principal, D. Lélius Balbus avec l’un de ses aides, L. Cornelius Balbus, homme d’affaire espagnol et client de Pompée16. Boulanger parle de D. Lélius Balbus, mais le patronyme de Balbus accolé à celui de Laelius n’apparaît pas dans le texte de Cicéron. Nous pensons qu’il s’agit d’une erreur de Boulanger que Faurisson a reprise.

 Faurisson écrit :

qui menait l’accusation, ait obtenu que la cause fût plaidée dans le quartier juif

Quoi? Qu’est-ce que c’est que cette invention? Jamais Cicéron n’écrit que le procès fut plaidé dans « le quartier juif »!

Faurisson falsifie purement et simplement Cicéron. Car ce que Cicéron dit c’est que le procès a lieu « non longe a gradibus Aureliis », ce que Boulanger traduit par « non loin des degrés d’Aurelius ». Rien ne permet de dire qu’il s’agit d’un (et encore moins du) quartier juif. Il s’agit d’une invention, d’un mensonge, de Faurisson. En fait les degrés d’Aurelius étaient un emplacement, non loin du Forum (donc certainement pas un lieu d’habitation) que seul Cicéron a jamais mentionnés. Et Cicéron n’a jamais écrit qu’il s’agirait d’un quartier juif!

Faurisson en falsificateur de Cicéron, voilà qui est inédit, même si cela ne surprend pas.

Nous renvoyons bien sûr à l’ouvrage de L. Richardson Jr pour l’étude de la géographie de la Rome ancienne, notamment les « gradus Aurelii »17.

 Faurisson écrit :

et que le prétoire fût peuplé d’une tourbe juive (« illa turba quaesita est »).

« illa turba quaesita est » que Boulanger traduit par « cette foule de gens que voilà »! (quaesita n’a rien à voir avec quoique ce soit de juif)

Cicéron se garde de parler de « tourbe juive ». C’est Faurisson qui place ce genre de précision (« juive ») chez Cicéron... Ce n’est pas un hasard. Faurisson est un antisémite. D’autre part Faurisson est le seul de tous les traducteurs que nous avons consultés qui traduise « turba » quasi-littéralement par « tourbe ». « Tourbe » a certes, en français, le sens de « foule », de « multitude » de « populace », mais c’est un sens que la plupart des gens ne connaissent plus (le Robert mentionne qu’il s’agit d’un mot « péjoratif et vieilli »). Le sens le plus commun étant celui de cette matière végétale en décomposition qui sert de combustible, qui évoque de la boue. Mais il est de fait que l’expression « tourbe » est habituelle dans le vocabulaire antisémite du début du siècle. Ainsi, Charles Maurras, dans un article paru dans l’Action Française du 27 septembre 1920 parlait de « tourbe » pour désigner les Juifs que « vomit le centre et l’orient de l’Europe ». Que Faurisson choisisse d’utiliser justement la même expression de « tourbe » n’est décidément pas un hasard, d’autant plus qu’il invente la précision « tourbe juive »18.

La précision « juive » inventée par Faurisson, associée à son choix très particulier d’un mot utilisé par les antisémites du début du siècle dernier, mais largement tombé en désuétude et évoquant de la boue, relève de la falsification antisémite.

A deux reprises, donc, Faurisson vient de falsifier le texte de Cicéron dans un objectif clairement antisémite.

 Faurisson écrit :

Il ajoute même une observation intéressante : quand ce Lélius parle, il détourne son visage de celui des juges et s’adresse directement à cette tourbe (« turbam ») (p. 120-121).

Rhétorique d’avocat qui ne prouve strictement rien de ce que Faurisson insinue. Le passage du pro Flacco relatif aux Juifs représente moins de 3% du total. Marginal. Au contraire de ce que dit Faurisson...

On aura noté l’insistance de Faurisson sur le mot « tourbe ».

 Faurisson écrit :

Vous avez eu raison de mentionner les réserves ‹ toutes empreintes de sagesse classique ‹ qu’A. Boulanger exprime sur l’honnêteté du propréteur ou sur les procédés rhétoriques de Cicéron.

Pas des réserves. Une franche conviction que Flaccus était coupable. Conviction partagée par bien d’autres historiens. Voir plus haut.

 Faurisson écrit :

Mais vous auriez également dû, par souci d’impartialité et d’équilibre, rappeler comment le même A. Boulanger résume les observations de Cicéron sur le compte du porte-parole des juifs, D. Lélius Balbus.

Le porte-parole des Juifs? Encore un mensonge de Faurisson.

Aucun des deux accusateurs, Cornelius Balbus ou D. Laelius n’est le « porte-parole » des Juifs (l’un d’eux est un homme de Pompée, l’homme qui a conquis Jérusalem). Ceci est une invention de Faurisson. Une telle affirmation n’apparaît nulle part, ni chez Cicéron, ni chez Boulanger, ni chez aucun historien. Laelius est un des deux accusateurs. C’est lui, ainsi que le rapporte Boulanger, qui est allé chercher les victimes de Flaccus et non l’inverse. Mais pour Faurisson, faire de Laelius (ou de Balbus) le « porte-parole des juifs » est une invention cohérente avec sa précédente invention qui consistait à faire du procès contre Flaccus une « machination juive ». Pour Faurisson, des Juifs qui intentent un procès ne peuvent qu’être des manipulateurs, certainement pas des victimes ou même des témoins. Faurisson est un antisémite.

 Faurisson écrit :

Je cite A. Boulanger :

Au dire de Cicéron, [Lélius, cherchant à réunir des charges contre Flaccus,] parcourut l’Asie [mineure] accompagné d’un cortège plus nombreux sans doute que ne le permettait la loi ; il n’épargna ni peine ni argent pour recueillir des témoignages écrits des particuliers et des cités, les provoquant au besoin par des largesses ou des menaces. Il constitua une véritable armée de témoins à charge ; il fit désigner par maintes cités des délégations qui devaient se rendre à Rome et leur assura de généreux frais de route. A Rome, pour les mieux tenir en mains, il les logea dans sa propre maison et ne cessa de leur souffler leur rôle (p. 61).

En guise de commentaire, malheureusement non accompagné d’éléments de preuves,

Mais oui... « Une preuve, une seule preuve... ». C’est le leitmotiv de Faurisson. Pathétique.

Rappelons une fois de plus que la culpabilité de Flaccus ne fait aucun doute aux yeux des historiens et des traducteurs de Cicéron. Et renvoyons à l’intégralité du passage de Boulanger cité plus haut.

 Faurisson écrit :

A. Boulanger se trouve ajouter :

Les accusateurs n’avaient pas eu de peine à trouver dans l’administration de Flaccus de quoi dresser un copieux réquisitoire. Il est fort probable que le discours de Cicéron ne mentionne pas tous les griefs articulés par l’accusation et qu’Hortensius [autre avocat de Flaccus] s’était réservé la réfutation de quelques-uns entre eux.

Tout ceci prouve sans la moindre ambiguité que les Juifs ne sont pas ceux qui ont « machiné toute l’affaire » selon l’expression antisémite de Faurisson et « malheureusement non accompagnée de preuve »... Le but initial du procès était politique, mais les motifs relevés pour constituer l’accusation n’en demeurent pas moins valides. C’est cela seul qui importe, en l’occurrence.

 Faurisson écrit :

Vous êtes obnubilé par l’argent des juifs

Hé là! C’est Faurisson qui se réclame d’un politicien véreux qui a volé, entre autre, l’or de Juifs. Faurisson n’a qu’à mieux choisir ses modèles et ne pas omettre leurs forfaits... Il conviendrait de ne pas confondre les causes (les choix nauséabonds de Faurisson) et les effets: nos rappels des omissions de Faurisson quant au pedigree des « illustres prédecesseurs » choisis par Faurisson.

 Faurisson écrit :

Bref, en plus de négligences de détail, vous ne semblez pas bien connaître le sujet dont vous traitez,

Celui qui méconnait d’une façon lamentable le sujet dont il traite c’est Faurisson. Il invente un véritable complot juif en ignorant totalement les motifs initiaux du procès de Flaccus, et son vrai commanditaire, Pompée. Il transforme le procès en « machination » juive, ce qui relève de l’invention antisémite; prétend que le passage antijuif du Pro Flacco n’est pas marginal, trafique la traduction de Cicéron à des fins antisémites, invente un quartier juif là où il n’y en a pas...

Qu’un professeur de lettres ignore à ce point l’histoire de Rome et falsifie un auteur classique à des fins antisémites est affligeant et scandaleux.

A part ça, c’est nous qui ne connaissons pas le sujet dont nous traitons?

 Faurisson écrit :

vous portez des accusations non fondées,

A ceci près que les historiens, et Boulanger avec eux, s’accordent pour dire que Flaccus était coupable. Seules deux personnes le disent innocent, son avocat Cicéron et Faurisson qui voudrait nous faire croire que Flaccus était une victime d’une « machination » juive... Ben voyons!

 Faurisson écrit :

vous passez sous silence des éléments qui contredisent votre thèse

Pas notre thèse; celle des historiens, et de Boulanger, qui est que Flaccus était coupable des malversations dont il a été accusé, y compris le vol de l’or des Juifs. Faurisson s’est sciemment gardé de mentionner le contenu de l’accusation. Pourquoi Faurisson, s’il était si convaincu de l’innocence de Flaccus, n’avait pas fait mention du contenu de l’accusation, de toute l’accusation qui était loin de concerner seulement des Juifs? Pourquoi Faurisson, s’il était convaincu de l’innocence de Flaccus n’a pas fait mention de ce contexte dès le départ, et de l’acquittement, sinon parce qu’il sait fort bien que Flaccus était coupable et l’accusation fondée, nonobstant l’acquittement politique?

Faurisson qui cite Boulanger pour dire que Flaccus a été acquitté, et oublie de mentionner, que quelques lignes plus haut, Boulanger écrivait que Flaccus était coupable, nous reproche à nous de « passer sous silence des éléments qui contredisent notre thèse »? C’est l’hopital qui se fout de la charité! D’autant plus qu’il n’existe justement pas d’élément qui contredise, non « notre » thèse, mais la réalité: la culpabilité de Flaccus. Ah si: la plaidoirie de l’avocat de Flaccus, son ami Cicéron.

 Faurisson écrit :

et, enfin, vous formulez vos appréciations en des termes qui font douter de votre capacité de jugement.

Ce genre de critiques venant de la part de Faurisson nous sont le plus beau des compliment. Que Faurisson enrobe ses ignominies antisémites dans un français châtié ne change en rien le fait qu’il s’agit d’ignominies antisémites. Nous n’avons pas la même maîtrise de la langue que Faurisson? La belle affaire! Ce que nous écrivons n’en est pas moins exact. Ce que Faurisson écrit est tissé de falsifications antisémites. Cela seul compte.

 Faurisson écrit :

Voici un échantillon de ces termes : « politicien pourri », « manière frauduleuse », « politicien véreux », « escroqueries, dénis de justice, captation d’héritages », « détourné les fonds », « extorqué de l’argent », « détourné à son profit », « un pourri », « escroc », « voleur de Juifs », « politicien pourri qui a volé les Juifs », « politicien corrompu, escroc et spoliateur de biens juifs ».

Nous persistons et signons. Faurisson se réclame d’un politicien pourri qui a détourné des fonds, extorqué de l’argent, détourné à son profit l’or de la flotte romaine, un escroc qui a très probablement volé l’or que des Juifs envoyaient au Temple de Jérusalem. Faurisson a présenté cette affaire en passant le contenu de l’accusation, et la place — marginale — qu’y tenait la partie juive, complètement sous silence. Il s’agit bien d’une présentation frauduleuse. Faurisson reprochant à quiconque un « manque de jugement », est aussi crédible que la Cicciolina militant pour la chasteté.

 Faurisson écrit :

L’argent, comme on le voit, occupe une place importante dans le flot de vos accusations, qui, rappelons le, n’ont pas été retenues par les juges.

Les juges ont acquitté, semble-t-il, Flaccus pour des motifs politiques. Flaccus était coupable de ce dont on l’accusait. Est-ce notre faute, à nous, si Faurisson décide de se réclamer d’un politicien corrompu qui, lui, était obsédé par l’argent. Si l’argent est au cœur des délits commis par le personnage retenu par Faurisson, qu’y pouvons-nous? Faurisson n’avait qu’à faire preuve de plus de discernement dans son choix « d’illustres prédécesseurs ».

 Faurisson écrit :

Encore une erreur : sur la loi Fabius-Gayssot [...]

Dans la mesure où le passage où Faurisson s’étend sur un mensonge qu’il avait proféré à propos de la loi Gayssot qui interdit l’expression publique des discours négationnistes, ce qui n’a guère de lien avec Cicéron et Flaccus, le traitement — c’est à dire la démonstration des falsifications de Faurisson — de ce passage, fait l’objet d’une autre page web...

 Faurisson écrit :

Je laisse le dernier mot à Bernard Lazare Vous terminez en mentionnant Paul Rassinier. Vous écrivez que ce dernier avait, avant moi, « utilisé le Pro Flacco de Cicéron, mais pour le falsifier et soutenir un bobard antisémite ».

Rassinier a prétendu, en s’appuyant frauduleusement sur Cicéron, que les Juifs mettaient la main sur tout l’or du monde romain. Ce bobard antisémite est démonté à la page suivante: http://www.phdn.org/negation/rassinier/ciceron.html

 Faurisson écrit :

Pour vous répondre sur ce point,

Ah! Voilà qui est intéressant: « Pour vous répondre sur ce point »? Nous pouvons donc espérer que Faurisson va produire des éléments qui démontreront que Rassinier a raison... Il semble donc par conséquent que Faurisson souscrit au mensonge antisémite de Rassinier!

Voici donc:

 Faurisson écrit :

j’en appellerai à Bernard Lazare qui, en 1894, écrivait au sujet de Cicéron : « Il les redouta, et, par certains passages du Pro Flacco, nous voyons qu’il osait à peine parler d’eux, tant ils étaient nombreux autour de lui et sur la place publique » (L’Antisémitisme, son histoire et ses causes, réédition La Vieille Taupe, 1982, p.27).

Et alors? Cela n’a rien à voir avec le mensonge de Rassinier! Ce que Rassinier rapporte de Cicéron est un mensonge. Faurisson deviendrait-il aveugle? La citation de Bernard Lazare étaye-t-elle le mensonge de Rassinier? Bien sûr que non. Faurisson écrit n’importe quoi. Il est incapable de faire ce qu’il annonce à la phrase précédente. Lamentable.

Mais s’il a envie de souscrire au mensonge antisémite de Rassinier, pourquoi ne l’écrit-il pas clairement, au lieu de botter en touche et de faire dans le hors sujet?

 Faurisson écrit :

En conclusion, je pense que, somme toute, j’étais donc fondé à écrire les lignes dont vous me faites grief et qui se terminaient en ces termes :

La description que fait l’illustre orateur de l’influence, de la puissance et des procédés des juifs de Rome dans le prétoire [en 59 avant notre ère] me donne à penser que s’il revenait sur terre, au XXe siècle, pour y défendre un révisionniste, il n’aurait pour ainsi dire pas un mot à changer sur ce point dans sa plaidoirie du Pro Flacco.

En conséquence de quoi, il apparaît que Faurisson s’est livré à une présentation partielle et frauduleuse afin de faire passer pour victime un politicien véreux coupable des malversations dont il était accusé, et passées sous silence par Faurisson. Il apparaît que Faurisson continue de présenter de façon frauduleuse toute cette affaire, en continuant notamment à prétendre que Flaccus aurait été innocent parce qu’acquitté, alors que l’auteur même invoqué par Faurisson comme garant de l’acquittement dit explicitement, à la même page, que Flaccus était coupable. Il apparaît que Faurisson, en attribuant aux Juifs un rôle clé dans l’accusation, commet une invention à caractère antisémite. Il apparaît que Faurisson a falsifié le texte de Cicéron à des fins antisémites. L’obsession antisémite de Faurisson est telle qu’il en est réduit à prétendre que le procès contre Flaccus était une machination juive.

 Faurisson écrit :

A tort ou à raison, les juifs passent volontiers pour nourrir des haines inexpiables.

(merci pour cet exemple de propos antisémites)

A raison les antisémites passent volontiers pour nourrir des haines inexpiables contre les Juifs au point de se réclamer deux mille ans plus tard d’un discours antijuif de Cicéron, d’un personnage qui a volé les Juifs, et de crier, de façon mensongère et frauduleuse, à deux mille ans de distance, au complot juif, reprenant ainsi les mensonges d’un ami et admirateur d’Hitler.

Et, à raison, l’être humain passe pour ne pas porter dans son cœur ceux qui le haïssent...

 Faurisson écrit :

Dans votre cas, je note que plus de deux mille ans ont passé depuis que L. Flaccus est mort et, pourtant, vous vous exprimez sur son compte avec la même passion vengeresse que si le « crime » que vous lui imputez — et qu’il n’a, en fait, jamais commis,— datait tout simplement d’hier.

Notons que dans le cas présent, c’est Faurisson qui s’est réclamé de Flaccus, deux mille ans après la mort de Flaccus. Nous n’y pouvons pas grand chose. Si Faurisson se réclame d’un voleur d’il y a deux mille ans nous ne voyons pas pourquoi nous parlerrions de Caliméro... Le choix du sujet était imposé par Faurisson. Il n’a qu’à s’en prendre à lui-même. C’est bien Faurisson qui dénonce un complot juif (inventé) contre Flaccus, d’il y a deux mille ans, comme s’il s’agissait d’hier...

 Faurisson écrit :

Vous avancez que je suis antisémite.

Faurisson est un négationniste, un antisémite et un falsificateur. C’est cela, oui.

Voir notamment: http://www.phdn.org/negation/faurisson/

 Faurisson écrit :

Puis-je vous demander si vous êtes juif ?

Qui est obsédé?
 

Ainsi s’achève la « réponse » de Faurisson.

En résumé, voici les erreurs, mensonges et omissions que Faurisson commet dans sa « réponse »:

Faurisson est un antisémite et un falsificateur. Voir: http://www.phdn.org/negation/faurisson/

Nous le remercions de nous avoir fourni une nouvelle occasion de le démontrer. Ainsi que Robert Etienne, son porte-parole quasi-officiel sur les forums de discussion, qui s’est de facto associé aux mensonges antisémites proférés par Faurisson... Nous nous demandons cependant si Robert Etienne est toujours aussi satisfait d’avoir posté la « réponse » de Faurisson...

Rappelons que Faurisson s’est également comparé à l’antisémite hystérique et collaborationniste Henri Labroue. Il n’a pas « répondu » à la page que nous consacrons à ce sinistre individu...


Notes.

1. Voir http://www.phdn.org/negation/faurisson/flaccus.html

2. Louis H. Feldman a constaté à propos de la charge anti-juive de Cicéron : « Cicéron [...], ainsi que nous l’avons remarqué, décrit les Juifs dans des termes qui rappellent ceux des fanatiques anti-juifs modernes » (Louis H. Feldman, Jew and Gentile in the Ancien World, Princeton University Press, 1993, p. 172).

3. R.Etienne <robert.etienne@free.fr>, « Re: Conférence révisionniste à Beyrouth », fr.soc.histoire, 16 janvier 2001, Message-ID: <9h786tculpru6ljeup2vft0savt31upgob@4ax.com>. Nous avons répondu sur le même forum de discussion le jour même: Gilles Karmasyn <gilkarm@worldnet.fr>, « Re: Conférence révisionniste à Beyrouth », fr.soc.histoire, 16 janvier 2001, Message-ID: <gilkarm-4B54F4.21243616012001@news.free.fr>. La présente page web est un adaptation et une correction de cet article.

4. Notons cependant que si Faurisson nous avait fait parvenir cette réponse, il nous aurait été impossible d’en faire part en public dans la mesure où cela aurait relevé de la divulgation d’un courrier privé. Il est de fait que la réponse envoyée par Robert Etienne n’apparaissait, à la date de son envoi, sur aucune page web. Remercions donc une fois encore Robert Etienne d’avoir rendu publique la « réponse » de Faurisson.

5. André Boulanger, « Notice », dans Cicéron, Discours, Tome XII, Pour L. Flaccus texte établi et traduit par André Boulanger, cinquième tirage revu, corrigé et augmenté par Philippe Moreau, Les Belles Lettres, 1989, p. 59-59, 67.

6. André Boulanger, op. cit., p. 67.

7. Par exemple, H. Graetz écrit que « Nous ne savons quelle fut l’impression produite par ce discours, ni comment ce procès se termina pour Flaccus » (H. Graetz, Histoire des Juifs, tome deuxième, de l’exode babylonien (538) à la destruction du second Temple, A. Lévy Libraire-éditeur, 1884, p. 207)

8. Erich S. Gruen, The Last Generation of the Roman Republic, University of California Press, 1995 — 1ère éd. 1974 —, p. 291

9. Harry J. Leon, The Jews of Ancient Rome, Hendrickson Publishers, 1995, p. 4

10. Louis E. Lord, « Introduction », dans Cicero, The Speeches, Harvard University Press, p. 358

11. Havard University Press, 1968, p. 92

12. André Boulanger, op. cit., p. 67.

13. E. Mary Smallwood, The Jews under roman rule, Leiden - E. J. Brill, 1981, p. 124-125.

14. ibid., p. 126

15. Harry J. Leon, op. cit., p. 5

16. Erich S. Gruen, op. cit., p. 290

17. L. Richardson Jr, A new topographical dictionnary of Ancient Rome, The Johns Hopkins University Press, 1992, p. 181-182.

18. La connotation péjorative de « tourbe » a été récemment relevée par Pierre André-Taguieff, dans les discours racistes du XIXe siècle. Évoquant les multiples usages péjoratifs de variations du mot « sémite » chez Gobineau, Pierre André-Taguieff cite par exemple l’expression suivante chez Gobineau : « la tourbe plus qu’à demi-sémitique » (Pierre André-Taguieff, La couleur et le sang, Mile et une nuits, 2002, p. 47, note 82). Taguieff écrit: « Chez Gobineau, la démocratie est notamment approchée et stigmatisée à travers la métaphore du “marécage”, ce dans quoi les races nobles s’embourbent, l’élément par lequel, plus fatalement qu’àprès les conquêtes guerrières, les races supérieures s’enlisent dans “la boue” des races impures. L’éradication de l’élément ethniquement supérieur s’opère par son embourbement dans l’élémént inférieur : immersion dans la tourbe humaine, submersion par la marée de boue infra-humaine. » (Ibid, p. 50). On le voit, les réflexes lexicaux de Faurisson viennent de loin...

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18/02/2001 -- mis à jour le 06/02/20 13